Comment soutenir le travail de plaidoyer de la jeunesse pendant une crise sanitaire

Écrit par Zoneziwoh Mbondgulo-Wondieh, Women for a Change, Cameroun

Ce guide a été rédigé en 2020 en réponse à la pandémie de COVID-19.

Certaines des informations ne seront pas aussi pertinentes pour la situation actuelle, mais nous pensons que ce guide offre des conseils utiles aux défenseur·euse·s des DSSR.

Pouvez-vous décrire dans quel contexte de travail vous avez développé ces connaissances sur une réponse féministe à la crise du COVID-19?

Faute d’être préparées au confinement imposé par le coronavirus, nous avons dû interrompre brusquement notre projet, à savoir un programme de développement des capacités des adolescentes baptisé gShe (acronyme anglais de Genre, Sexualité, Santé, Education). Mais après quelques semaines de réflexion et de discussion, voyant l’ampleur de la désinformation qui circulait au sujet du COVID-19 et d’autres enjeux de santé, nous nous sommes demandé comment nous pourrions reprendre notre engagement et soutenir nos jeunes pour les aider à aborder cet enjeu tout en développant leurs propres capacités.

Qu’avez-vous appris sur les défis qui attendent les activistes dans une telle situation?

Nous nous sommes demandé:

  • Comment transformer la classe en un espace virtuel, sur des applications de type WhatsApp, tout en maintenant l’engagement des adolescentes au même niveau qu’avant le COVID-19?
  • Comment nous assurer que celles qui n’ont pas de téléphone ou de connexion internet ne soient pas exclues?
  • Comment nous assurer que celles qui ont un smartphone soient bien connectées?
  • Comment faire en sorte que les adolescentes ne soient pas submergées par une surabondance de contenus en ligne ?
  • Comment mesurer les résultats dans de telles circonstances?

Comment avez-vous abordé ces défis – et avec quels résultats?

Pour permettre au plus grand nombre de participer, nous avons fourni des recharges de données mobiles à celles qui en avaient besoin pour participer à nos tchats et groupes de discussion hebdomadaires. Quant à celles qui n’avaient pas WhatsApp, nous les avons contactées par SMS ou téléphone. Pour celles qui n’avaient pas de téléphone, nous sommes passées par le relais des parents, qui nous connaissaient grâce au projet.

Grâce à ces stratégies, nous avons organisé des réunions occasionnelles sur Zoom ou d’autres plateformes en ligne avec les adolescentes, pour entretenir le dialogue sur leur autonomie et leur droit à disposer de leur corps, le leadership et leur expérience face au COVID-19.

Nous avons eu l’heureuse surprise de constater que pendant le confinement, les jeunes elles-mêmes organisaient des tchats pour débattre de leurs idées d’activisme et les transformer en stratégies et activités. Elles ont commencé à développer des idées concrètes et novatrices, par exemple organiser des forums en ligne pour dénoncer le harcèlement et la brutalité de la police envers les jeunes qui ne portent pas de masque, ou encore la violence entre partenaires intimes.

L’une de ces initiatives passionnantes est une campagne éducative d’histoires en images sur Facebook, pour diffuser des messages de prévention du COVID-19, intitulée « WFAC en discussion avec des jeunes sur le COVID19CMR ». Par ce biais, elles postent chaque jour le récit personnel d’une adolescente sur ce que le COVID-19 signifie pour elle.

Quelles ont été les principales leçons de cette expérience pour vos activistes?

Voir émerger le leadership des jeunes au sein de notre groupe d’adolescentes durant cette période difficile a été une formidable source d’inspiration.

L’intégration de la technologie à nos outils de travail, notamment sous forme d’apprentissage entre pairs autour du COVID-19, de l’hygiène menstruelle et des questions d’eau/assainissement/hygiène, a montré la transformation qui s’est opérée chez ces adolescentes à la faveur du programme gShe en termes d’autonomie décisionnelle, de développement et de capacité à déployer une réflexion critique pour remettre en cause constructivement les systèmes inégalitaires.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait dans une situation similaire?

  • Adoptez une approche participative et prenez soin d’inclure toutes les parties prenantes à chaque étape, c’est essentiel pour construire la confiance et des relations plus transparentes.
  • En période de crise, un·e leader doit être suffisamment humble pour ne pas avoir peur de montrer sa vulnérabilité, et suffisamment flexible pour accepter les changements et apprendre de ses élèves. Nous avons discuté ouvertement de ces nouveaux défis avec les jeunes et les avons encouragées à proposer des solutions alternatives pour poursuivre notre travail. Cela a donné un résultat remarquable de la part des adolescentes. Ce qui est tout aussi précieux est que beaucoup d’entre elles sont fières de ce qu’elles ont réussi à accomplir.

Avez-vous des photos ou documents qui pourraient aider ou inspirer d’autres groupes ou organisations confrontés aux mêmes défis? 

Campagne Facebook de WFAC en discussion avec des jeunes sur le COVID19CMR.

Nous aimerions avoir de vos nouvelles :

Ce guide vous a-t-il été utile? Est-il facile à comprendre? Avez-vous utilisé ces conseils et obtenu des résultats? Veuillez partager vos réflexions avec nous dans la section Aider et Contribuer, ci-dessous.

Zoneziwoh Mbondgulo-Wondieh, Women for a Change, Cameroun

Zoneziwoh Mbondgulo-Wondieh (@ZoFem) est une blogueuse et chercheuse féministe humanitaire reconnue, déjà récompensée pour son œuvre, forte d’une expérience de plus de dix ans dans l’activisme numérique autour des questions de genre, de la construction de mouvements, du plaidoyer politique et de la promotion de jeunes leaders. Son plaidoyer consiste à créer un espace où les femmes et les filles peuvent se faire entendre des décisionnaires et des responsables des choix politiques aux plus hauts niveaux, dont celui de la Commission sur le Statut des Femmes (CSF), ainsi qu’à traduire et à faire connaître les cadres et protocoles nationaux et internationaux sur les droits des femmes. Zoneziwoh est titulaire d’un Master en Sexualité, Genre et Violence.

www.wfaccameroon.org