Comment rendre les mécanismes de réponse à une crise sanitaire inclusifs

Écrit par Onai Hara and Agness Chindimba, Deaf Women Included, Zimbabwe

Ce guide a été rédigé en 2020 en réponse à la pandémie de COVID-19.

Certaines des informations ne seront pas aussi pertinentes pour la situation actuelle, mais nous pensons que ce guide offre des conseils utiles aux défenseur·euse·s des DSSR.

Veuillez décrire le contexte dans lequel vous avez tiré les enseignements liés à ce guide : comment rendre les mécanismes de réponse à une crise sanitaire inclusifs

Ces enseignements émanent d’expériences partagées avec Deaf Women Included par des filles et des femmes en situation de handicap au Zimbabwe pendant la pandémie de COVID-19. Le confinement national visant à endiguer la progression du virus a eu des effets désastreux pour elles. L’un des exemples est les défis rencontrés pour accéder aux services de planification familiale pour les femmes à mobilité réduite, étant donné la limitation des services de transport. De plus, il n’existe aucune mesure sociale digne de ce nom pour contrecarrer les impacts économiques de la pandémie, impacts qui affectent de manière disproportionnée les filles et les femmes en situation de handicap (UN Women)[1]

Qu’avez-vous appris des défis rencontrés par les activistes dans ce contexte ?

La pandémie a renforcé l’exclusion de la question des DSSR des femmes en situation de handicap tant par le mouvement féministe que par le mouvement du handicap au Zimbabwe. Au sein des organisations travaillant avec les survivantes de violences basées sur le genre, il n’y a pas de référencement clair pour celles ayant des besoins spécifiques tels que des guides, des interprètes ou des travailleur·se·s sociaux·les.

Le mouvement du handicap s’est, quant à lui, focalisé en grande partie sur le soutien aux personnes en situation de handicap concernant les biens de première nécessité et l’accessibilité des informations liées au COVID-19. Par conséquence, nous ne disposons pas d’outils et de ressources pour soutenir celles et ceux que nous représentons afin de faire face aux problématiques liées aux DSSR pendant la pandémie. Enfin, les discussions en ligne sur le COVID-19 restaient silencieuses sur la question du handicap et des DSSR ce qui nous a poussé·e·s à lancer des discussions Twitter (ou tweet chat). 

Comment avez-vous relevé ces défis, qu’avez-vous accompli ?

La pandémie du COVID-19 nous a fait réaliser que nous devons créer des partenariats avec le plus d’organisations possible afin de protéger et faire progresser les droits et les besoins des filles et des femmes en situation de handicap.  

Nous avons aussi commencé à utiliser Twitter pour nous faire entendre. L’objectif était de mettre sur le devant de la scène les voix de femmes en situation de handicap tant dans les espaces féministes que dans les conversations des organisations de personnes en situation de handicap.  

Twitter était la plateforme idéale car nous nous sommes rendu·e·s compte que les organisations travaillant sur la réponse à la pandémie de COVID-19 ainsi que les personnalités influentes du Zimbabwe l’utilisaient. Etant donné la limitation des mouvements entraînée par le confinement, Twitter est devenu notre plateforme de plaidoyer privilégiée pour impulser le changement.  

Nous avons créé des visuels pour communiquer sur nos discussions twitter (ou tweet chat) et les avons partagés dans nos réseaux et auprès de nos partenaires. Nous avons aussi participé à des discussions twitter (ou tweet chat) organisées par d’autres comme celui de Women Coalition of Zimbabwe et de Southern African AIDS Trust, afin de rendre leurs échanges inclusifs.

Être convié·e·s sur ces plateformes par des organisations généralistes a été un succès important pour nous car cela a contribué à la prise en compte des besoins des femmes en situation de handicap par le mouvement, besoins jusqu’ici ignorés.

Qu’avez-vous appris de cette expérience ?

En tant qu’activistes, nous avons appris qu’étendre notre travail au-delà des espaces physiques pour aller sur le digital était un moyen de s’insérer dans les mouvements des DSSR et du handicap, mais aussi un moyen d’atteindre de nouvelles personnes pour la mobilisation des ressources et le plaidoyer.

Un exemple est le « Pad-drive » (drive pour les protections hygiéniques) récemment lancé en partenariat avec Signs For Hope et qui reçoit un soutien impressionnant. Cette campagne vise à mobiliser des fonds via les transferts d’argent et à collecter des colis sanitaires composés de protections hygiéniques, de sous-vêtements et de savon pour aider les filles et les femmes à gérer leurs menstruations avec dignité.

Nous avons déjà reçu des promesses de dons représentant l’équivalant de 20 colis, soit près de 400 protections hygiéniques.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait face à une situation similaire ?

Construisez des réseaux composés des groupes concernés par la cause afin de maximiser votre mobilisation des ressources et pour vous assurer que votre travail est inclusif et ne laisse personne pour compte.

Les personnes concernées par les problématiques sont les expertes de leurs propres réalités et possèdent des solutions, suggestions et idées sur les meilleurs moyens de résoudre les défis auxquels elles sont confrontées. Comme le martèle le slogan du mouvement du handicap : « rien sur nous, sans nous ». Pour impulser des stratégies de réponse inclusives, il est nécessaire d’inclure les femmes en situation de handicap et ce, dès la phase de planification.  

En développant une conversation digitale comme un « tweet chat », il est important de définir un thème clair et les cibles, c’est-à-dire celles et ceux que vous voulez voir interagir. Pour que votre campagne soit puissante, taguez les partenaires du développement, les financeurs, les instances gouvernementales et les officiel·le·s travaillant sur les thématiques visées. Communiquez sur votre « tweet chat » assez en amont afin d’attirer une audience nombreuse, y compris à travers d’autres réseaux sociaux.  

Pouvez-vous nous en dire plus sur les défis rencontrés par les activistes dans cette situation ?

Nous avons réalisé que même si utiliser l’espace numérique est essentiel, il est nécessaire d’atteindre les populations rurales qui sont susceptibles de rencontrer des difficultés d’accès aux contenus en ligne. Cela a été fait par le biais de l’apprentissage par les pair·e·s et de collaborations avec des organisations menant des programmes de sensibilisation communautaire. 

Nous avons aussi commencé à créer plus de contenu sur les DSSR et le handicap pendant la pandémie de COVID-19 en partenariat avec Signs For Hope. L’un des exemples est le « Pad-Drive » en ligne (drive de protections hygiéniques) que nous menons pour sensibiliser et collecter des fonds en faveur de la santé menstruelle des filles et des femmes en situation de handicap.

[1] Les femmes en situation de handicap représentent environ les deux tiers des personnes en situation de handicap dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Les données de UNWomen démontrent également que le taux d’emploi des femmes en situation de handicap est de 20% contre 53% pour les hommes en situation de handicap. Source UNWomen Issue Brief: Making the SDGs count for women and girls with disabilities. Disponible ici (en anglais) : https://www.un.org/development/desa/disabilities/wp-content/uploads/sites/15/2019/10/Making-SDGs-count-for-women-with-disabilities.pdf

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Ce guide vous a-t-il été utile ? Est-il facile à comprendre ? Avez-vous utilisé ces conseils et obtenu des résultats ? Veuillez partager vos réflexions avec nous dans la section Aider et Contribuer, ci-dessous.

Onai Hara and Agness Chindimba, Deaf Women Included, Zimbabwe

Onai Hara est une travailleuse sociale qualifiée ayant 4 ans d’expérience dans l’accompagnement des femmes et des filles en situation de handicap. Elle est passionnée par l’accessibilité des informations et des services sur les DSSR pour les femmes et les filles en situation de handicap et apporte un soutien technique pour l’intégration systématique du handicap au sein des organisations féministes et des services dédiés aux violences basées sur le genre. Elle a facilité des formations sur les droits humains avec des femmes et des filles en situation de handicap et est une activiste engagée pour la disponibilité de la langue des signes dans les services de santé.

Agness Chindimba est sourde et est une activiste pour les droits des personnes en situation de handicap avec plus de 10 ans d’expérience dans le travail avec les filles et les femmes en situation de handicap ainsi que les jeunes sur les thématiques des DSSR et de l’égalité de genre. Elle est la fondatrice et directrice de Deaf Women Included, une organisation dont la mission est de défendre les droits des filles et femmes sourdes au Zimbabwe. Elle est l’une des consultant·e·s en charge de l’étude de référence « Spotlight » du Zimbabwe où elle est responsable des questions liées au handicap.

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