Comment plaider en faveur d’une disponibilité et/ou d’une accessibilité accrues des données sur les indicateurs de santé sexuelle et reproductive, ventilées par handicap, publiées par les acteurs de la santé

Écrit par Moses Fordjour, Ghana Federation of Disability Organisations

Pouvez-vous décrire un problème concret auquel votre organisation a été confrontée à ce sujet?

En 2010, l’Institut Statistique du Ghana a réalisé un recensement national de la population et des ménages, dont il est ressorti que 3 % de la population serait en situation de handicap « sévère ».

Cependant, l’instrument de collecte de données souffrait d’importantes lacunes et laissait place à l’interprétation (généralement sur la base d’observations) pour déterminer quelles personnes étaient en situation de handicap.

En conséquence, de nombreuses formes de handicap n’ont pas été décelées et la proportion de la population concernée a été largement sous-estimée.

Bien que, pour la première fois, des données spécifiques sur le handicap aient été collectées, le recensement n’a pas répondu à nos attentes ni à celles des parties prenantes du secteur.

Dans le secteur de la santé en particulier, les données relatives aux patient·e·s n’étaient pas ventilées : il était donc difficile de planifier, faute de données fiables sur les personnes en situation de handicap utilisant les services.

Comment avez-vous abordé et résolu ce problème?

La GFD a travaillé avec un outil de collecte de données appelé Liste Succincte de Questions sur le Handicap, un ensemble de six questions développé par le Groupe de Washington (GW), une initiative mondiale pour standardiser les données relatives au handicap.

Nous avons intégré ces questions à nos processus internes de collecte de données afin d’obtenir des résultats et de démontrer aux agences statistiques la nécessité d’améliorer leurs outils et processus.

Nous avons approché différentes institutions, dont l’Agence de la Santé du Ghana (ASG) pour les inciter à adopter les questions du GW.

Nous avions besoin de l’aval et du soutien des autorités à trois niveaux:

  • Au niveau national, le Secrétariat à la Vie Familiale de l’ASG
  • Au niveau des districts, le Directorat régional pour la Santé et son Service de la planification familiale et santé familiale
  • Au niveau des établissements de santé

Les trois niveaux étaient essentiels pour pouvoir disposer de données spécifiques exploitables sur le handicap. Tout d’abord, nous devions obtenir l’aval des décisionnaires à ces trois niveaux puis convaincre les parties prenantes d’adopter les questions du GW dans leur pratique professionnelle.

Au niveau des établissements de santé, où le personnel est en contact direct avec les patient·e·s, dont potentiellement des personnes en situation de handicap, l’engagement a été axé sur la collecte de données permettant d’approcher de façon ciblée les communautés.

Sous forme d’ateliers et de réunions en petits groupes, nous avons organisé des présentations expliquant l’utilité des questions du GW.

Quels résultats avez-vous obtenus et quels changements cela a-t-il entraînés?

L’Agence de la Santé du Ghana a reconnu l’intérêt d’utiliser les questions du GW aux trois niveaux de prise de décision.

La reconnaissance par les parties prenantes de la nécessité d’améliorer la collecte et ventilation des données a été une réussite de taille pour notre organisation.

Certains établissements de santé ayant participé au projet ont commencé à collecter spécifiquement ces données, grâce au questionnaire qui leur a permis de le faire facilement.

L’ASG affiche maintenant un réel engagement au niveau national et régional pour améliorer la collecte et la ventilation des données sur le handicap.

Que vous a appris cette expérience?

Nous avons identifié des points décisifs pour que des institutions telles que l’Agence de la Santé du Ghana adhèrent à l’initiative:

  • L’enjeu en question doit les aider à remplir leur mission et atteindre leurs objectifs. De fait, les questions du GW aident l’ASG à réussir ses évaluations annuelles et à augmenter ses propres performances.
  • Nous devons être en mesure de prouver, grâce à des données concrètes issues de la recherche, que de nombreux·ses patient·e·s en situation de handicap, n’ont pas été recensé·e·s.
  • Il est plus efficace de débuter la stratégie d’approche par des réunions en petits groupes permettant de présenter la nécessité et l’intérêt des questions du GW. Les rencontres de suivi en tête-à-tête servent à renforcer l’impact du plaidoyer ; les objectifs deviennent ainsi plus faciles à atteindre.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait dans une situation similaire ?

  • Pour obtenir l’aval d’autorités telles que l’ASG, il faut engager un dialogue interactif avec les bons services, gérant les domaines spécifiques concernés par votre plaidoyer. Dans notre cas, les interactions avec le Service de la Santé Familiale ont été décisives.
  • Après avoir obtenu l’approbation des autorités au niveau national et régional, il est plus facile d’entrer en contact avec les établissements de santé, grâce à l’appui des directorats de la santé.
  • Surtout, assurez-vous toujours d’obtenir une validation éthique du Service de la Recherche et du Développement avant toute collecte de données. C’est la clé pour accéder aux niveaux infranationaux.

The Washington Group Short Set of Disability Questions

Moses Fordjour, Ghana Federation of Disability Organisations

Moses Fordjour est Responsable du Suivi-Evaluation et de la Gestion des Connaissances de la Fédération des Organisations sur le Handicap au Ghana (GFD).

La GFD est depuis plus de trois décennies l’organisation cheffe de file du plaidoyer pour les droits et l’inclusion des personnes en situation de handicap au Ghana. Notre stratégie centrale consiste à collecter ou obtenir des données sur le handicap, que nous utilisons pour interpeler les institutions publiques et privées, les agences et parfois les individus.

Nous avons développé des outils de collecte de données sur le handicap et avons eu une influence stratégique sur l’Institut Statistique du Ghana et d’autres agences de collecte de données en vue d’améliorer la fiabilité des informations produites sur le handicap.