Comment mobiliser des ressources pendant le confinement pour répondre aux besoins de SSR des femmes et des filles en situation de handicap

Écrit par Agness Chindimba and Onai Hara, Deaf Women Included, Zimbabwe

Ce guide a été rédigé en 2020 en réponse à la pandémie de COVID-19.

Certaines des informations ne seront pas aussi pertinentes pour la situation actuelle, mais nous pensons que ce guide offre des conseils utiles aux défenseur·euse·s des DSSR.

Pouvez-vous décrire dans quel contexte de travail vous avez acquis ces connaissances?

La pandémie du COVID-19 et le confinement national décrété au Zimbabwe ont vu l’ensemble des citoyen·ne·s contraint·e·s de rester reclu·e·s à leur domicile. Cette situation a amputé les moyens de subsistance des personnes à faibles revenus, dont les femmes en situation de handicap – qui dépendent généralement du petit commerce informel.

La pandémie a, entre autres, compliqué l’accès aux protections hygiéniques pour les femmes et les filles en situation de handicap. Nombre d’entre elles ont dû se tourner vers des solutions malsaines en utilisant des journaux, des mouchoirs, des morceaux de tissus ou de la bouse de vache pendant leurs règles. L’aide humanitaire était pour l’essentiel centrée sur l’alimentation et laissait de côté l’hygiène menstruelle des populations pauvres et vulnérables.

Qu’avez-vous appris sur les défis qui attendent les activistes dans une telle situation?

Nous avons constaté qu’il est difficile de se rapprocher des populations dans le besoin pendant une pandémie où chacun·e est confiné chez soi. En outre, les ressources mobilisées pour répondre à la situation sont généralement monopolisées par les agences gouvernementales et les grandes ONG, au détriment des organisations locales de personnes en situation de handicap qui peinent à trouver des financements. Ces difficultés de financement se ressentent directement sur la capacité des activistes à promouvoir l’hygiène menstruelle de leurs bénéficiaires. Mais nous avons découvert que ces défis peuvent être un point de départ pour réinventer la façon dont nous militons. Nous nous sommes adressé·e·s à nos concitoyen·ne·s, avons mobilisé des ressources et avons poursuivi notre militantisme en ligne.

Comment avez-vous abordé ces défis – et avec quels résultats?

Face aux difficultés à mobiliser le gouvernement et les organisations d’aide d’urgence autour de notre projet, nous nous sommes tourné·e·s vers la communauté en levant des fonds grâce à des plateformes en ligne pour une campagne « Protections Hygiéniques ».

Nous avons conçu des flyers virtuels diffusés sur des réseaux sociaux comme Twitter, Facebook et WhatsApp pour appeler toute personne, groupe ou communauté intéressé·e·s à nous soutenir pour aider les femmes et les filles en situation en handicap à préserver leur dignité pendant leurs règles.

Nous avons massivement utilisé les systèmes mobiles de transfert d’argent, puisque les restrictions de déplacement empêchaient les donateur·rice·s d’apporter des protections hygiéniques à nos locaux. Ces systèmes permettent également de s’affranchir des barrières géographiques, puisque chacun·e, en tout point du pays, peut transférer de l’argent vers un numéro de portable donné. Ces fonds nous ont permis d’acheter des protections hygiéniques en magasin pour les distribuer localement.

Lorsque notre campagne a pris de l’ampleur, nous avons tissé des alliances avec d’autres partenaires de financement, dont la campagne PadUp6, pour augmenter le nombre de kits que nous pouvions acquérir. Nous nous sommes également adressé·e·s à d’autres partenaires susceptibles de soutenir notre initiative, et explorons avec eux de nouvelles formes de travail collaboratif.

Notre campagne a connu un grand succès. Nous avons mobilisé au total 500 protections hygiéniques et 100 savons à distribuer, avons ouvert un second cycle de dons et continuons à recevoir un soutien massif. Pour aller plus loin, nous avons sollicité auprès du Ministère de la Santé et de l’Enfance une lettre d’habilitation qui nous permettrait de poursuivre notre plaidoyer au sein des communautés dans tout le pays.

Quelles ont été les leçons de cette expérience pour vos activistes?

Nous avons appris à compter avant tout sur les communautés qui forment collectivement notre société pour obtenir les ressources dont nous avons besoin. Notre philosophie africaine Ubuntu « Je suis parce que nous sommes, et nous sommes parce que je suis » nous a encouragé·e·s à explorer des solutions locales pour soutenir notre projet.

Nous avons également appris qu’en ces temps difficiles, notre inspiration se nourrit de notre engagement à servir notre public et à préserver la dignité de ces personnes en militant pour des protections hygiéniques accessibles, abordables et de qualité. C’est notre conviction qui nous a motivé·e·s à explorer des solutions de travail alternatives, par exemple en ligne.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait dans une situation similaire?

  • Trouvez un partenaire de financement

Mobiliser des ressources n’est jamais chose aisée. Il y aura toujours des gens qui tenteront de vous décourager, mais votre devoir d’activiste est de faire preuve de persévérance et de chercher des partenaires potentiel·le·s partageant votre vision. En travaillant avec les organisateur·rice·s de la campagne PadUp6, entre autres partenariats, nous avons pu élargir notre portée et atteindre un public plus vaste. Vos partenaires de financement peuvent aussi être des membres de votre communauté qui souhaitent soutenir votre travail. Il est incontournable de chercher au sein de votre communauté (en ligne et au sens géographique) des partenaires potentiel·le·s grâce à qui vous pourrez amplifier votre impact.

  • Trouvez des façons de travailler alternatives lors d’une pandémie

La pandémie du COVID-19 a réduit notre capacité de plaidoyer dans l’environnement physique habituel, mais cela nous a incité·e·s à faire preuve de créativité pour explorer de nouvelles formes de travail à distance, en utilisant des technologies numériques telles que les paiements mobiles, pour continuer à servir notre public. Les paiements mobiles sont le système le plus rapide de transfert d’argent à l’échelle du pays, et présentent également l’avantage de pouvoir servir à régler directement les commerçants ou prestataires de services.

Agness Chindimba and Onai Hara, Deaf Women Included, Zimbabwe

Agness Chindimba is a disability rights activist and the Executive Director at Deaf Women Included. Agness is passionate about disability rights and women’s rights issues and has more than 8 years’ experience working with women with disabilities in sexual and reproductive health and rights (SRHR) and gender-based violence (GBV).

Onai Hara is the Project Manager at Deaf Women Included. She is a qualified social worker with experience working with women and girls with disabilities. She is passionate about the accessibility of SRHR information and services for women and girls with disabilities and provides technical support for mainstream disability inclusion in women’s rights.

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