Écrit par Gloria Njoki, Deaf Outreach Program, Kenya
En 2020, lorsque le monde a été bouleversé par le COVID-19, nos bénéficiaires ont été exposé·e·s au risque de perte d’emploi, au confinement et aux pénuries qui alourdissaient la charge d’assurer la subsistance de leur famille. Le risque de violences basées sur le genre (VBG) a également augmenté. Lorsqu’il est apparu que cette situation serait durable, nous avons pris conscience du besoin d’agir rapidement.
Face à l’urgence de la situation et au risque d’échec, nous avons pensé que nous ne pourrions pas compter sur les appels à projets comme en temps normal, c’est pourquoi nous nous sommes tourné·e·s vers le financement participatif.
Auparavant, nous avions déjà utilisé des sites internationaux comme 1% Club platform pour lever des fonds, mais cette fois-ci nous nous sommes intéressé·e·s à un site de crowdfunding local bien implanté au Kenya, à savoir M-Changa. M-changa permet aux gens de faire un don sécurisé sur le site par le moyen qui leur convient le mieux. Par exemple, il est possible de payer depuis son portable, par carte bleue ou par Paypal, et même des montants minimes comme 1 € sont acceptés.
M-Changa facilite des campagnes variées de financement, individuelles ou communautaires. Un appel à l’action communautaire a été partagé, pour demander des denrées alimentaires et d’autres articles, y compris des produits d’hygiène menstruelle. Le site est kenyan, mais le fait d’avoir lancé cet appel sur une plateforme numérique nous a assuré une couverture bien plus large que notre seule communauté. Les personnes proches de nos bureaux ou de notre zone ont souvent choisi d’amener elles-mêmes leurs dons en nature, mais celles qui habitaient plus loin ont fait des dons monétaires sur le site.
Au terme de la campagne, nous avions réuni un total de 1 350 €. Ceci nous a permis d’aider 80 familles affectées par le handicap. Nous leur avons fourni des colis alimentaires non périssables, des produits d’hygiène menstruelle et une vidéo sur les DSSR que nous avions produite dans le cadre de l’un de nos projets.
Cette expérience nous a beaucoup appris, notamment:
L’un des facteurs de succès du financement participatif, qui n’est pas spécifique à notre cause, consiste à faire jouer ses relations sociales et à trouver des ambassadeur·rice·s qui mobilisent directement leurs ami·e·s et leurs réseaux. Par exemple, des gens qui ne nous connaissaient pas et n’avaient pas entendu parler de notre travail ont fait un don parce qu’ils ou elles avaient confiance en la personne (leur ami·e/contact etc.) qui leur a conseillé de participer.
C’est important de structurer votre budget de façon à pouvoir malgré tout mener à bien votre projet, à plus petite échelle, si vous n’atteignez pas votre objectif de levée de fonds. Cette campagne a été facile à cet égard, car même avec seulement 1 euro nous pouvions acheter un article de cette valeur pour une personne.
Cette expérience nous a également démontré que des gens de tous les milieux sont prêts à s’engager pour surmonter un problème local, s’ils comprennent le problème et la solution qu’on leur expose. Pour remercier les donateur·rice·s, nous avons préparé des cartes de remerciement personnalisées et avons partagé des photos de ce que nous faisions. Voici un lien vers la page d’une entreprise qui nous a donné pour 600 euros de produits. Elle a également mis en ligne notre carte de remerciement : facebook.com/DummenOrangeEU
Du côté négatif, nous avons découvert que le processus de financement participatif peut être lourd à gérer, surtout si vous n’avez pas d’équipe spécialement pour cela.
A l’avenir, nous aurons de nouveau recours au financement participatif, mais grâce à cette expérience nous le planifierons différemment la prochaine fois, avec un processus mieux conçu et mieux coordonné. Par exemple :
Voici quelques conseils utiles pour se lancer dans le financement participatif :
Je dirais que les défis liés au financement participatif ont trait à ce que nous aurions dû faire, ou ce que nous espérons mieux faire la prochaine fois. Par exemple, à l’avenir :
En ce qui nous concerne, lorsque nous avons lancé notre campagne sur la plateforme internationale, notre bonne étoile a dû nous a aider car une seule personne nous a donné l’équivalent de notre objectif de financement.
Gloria Njoki est la fondatrice et directrice de Deaf Outreach Program (DEAFOP), une jeune organisation de terrain agissant autour du handicap. Elle milite notamment pour que les personnes sourdes, malentendantes ou vivant avec un handicap ne soient pas les oubliées des programmes de développement. Le principal projet de DEAFOP consiste à promouvoir l’accès aux informations de DSSR grâce au langage des signes, à travers différents programmes et innovations dans ce domaine.
En tant que directrice d’une jeune organisation locale, Ann Gloria doit entre autres piloter la levée de fonds de l’organisation en explorant toutes les options possibles, dont le financement participatif.