Comment lever des fonds en proposant des services de consultance ou d’autres services rémunérés

Écrit par Berhanu Demissie, Directeur exécutif, Centre d’Expertise pour le Développement, Ethiopie

Pouvez-vous décrire la situation qui a poussé votre organisation à lever des fonds?

Nos besoins de fonds sont liés aux politiques relatives aux OSC/ONG en Ethiopie et aux priorités de financement des bailleurs et du gouvernement. En 2015, lorsque les priorités de financement se sont détournées de l’aide au commerce, il nous est devenu plus difficile de mobiliser des ressources. Ces circonstances nous ont également amené·e·s à travailler davantage avec des partenaires de consortium, plutôt qu’en tant qu’organisation individuelle.

Pourquoi avez-vous choisi de proposer des services de consultance pour lever des fonds, et comment vous y êtes-vous pris·es?

Dans ces circonstances liées au marché du financement, nous manquions de ressources pour nos projets. Ceci nous a poussé·e·s à voir dans cette évolution une opportunité et à réfléchir à des solutions pour lever des fonds au niveau local. Nous avons sollicité nos bailleurs pour nous aider à renforcer nos capacités à mobiliser des ressources locales, et avons reçu de leur part une aide bienvenue. Nous leur avons également demandé de financer une étude de faisabilité pour explorer le potentiel de différentes activités génératrices de revenus.

En Ethiopie, de telles activités sont soumises au droit commercial et il est difficile de générer suffisamment de revenus pour atteindre l’autosuffisance. Cependant, en comparant nos compétences et notre expérience aux besoins d’autres OSC, du gouvernement et d’entreprises privées, nous nous sommes rendu·e·s compte qu’il existait une forte demande pour des sessions d’évaluation, de formation et de développement des capacités organisationnelles. Nous y avons vu une opportunité de proposer nos services de consultance. Nous avons également commencé à travailler plus souvent dans le cadre de consortia.

Quels résultats avez-vous obtenus?

En lançant nos activités génératrices de revenus, nous avons appris à repérer les opportunités locales de mobilisation de ressources. Nous nous sommes également familiarisé·e·s avec le droit commercial et les protocoles et exigences applicables aux OSC dans le pays. Nous nous sommes servi·e·s de notre expertise et expérience dans les domaines de l’éducation, de la création d’emploi et de la sécurité alimentaire pour produire des supports pédagogiques de qualité et des formations professionnelles pour l’industrie textile et l’engraissement de volailles. Par la suite, nous nous sommes diversifié·e·s en proposant aussi des évaluations de projet initiales, à mi-parcours et finales ; et des conseils d’entreprenariat. Les revenus issus de ces activités nous permettent de financer d’autres volets de notre travail. Nous avons aussi élargi nos réseaux et développé notre coopération avec d’autres OSC ; tant pour la mise en œuvre de certains projets que pour des campagnes communes de levée de fonds.

Que retenez-vous de cette expérience?

L’une des grandes leçons de cette expérience est que nous pouvons poursuivre notre projet et venir en aide à nos bénéficiaires en recherchant des opportunités de diversifier nos sources de financement. Nous avons également compris l’intérêt d’un business model clair, qui fait le lien entre nos activités génératrices de revenus et les personnes qui ont besoin de nos services. La gestion d’activités rémunérées ne ressemble pas à la gestion d’une OSC, il faut donc avoir une expertise et du personnel expérimenté et impliqué dans chacun des deux domaines. Mobiliser des ressources localement est possible, même si la croissance de ces revenus est lente.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait dans une situation similaire?

  • Bien connaître votre contexte local et les opportunités qu’il offre
  • Maîtrisez le droit et les règles de votre pays – c’est essentiel, faites-en une priorité
  • Développez un business model clair et désignez un·e responsable impliqué·e, passioné·e et expérimenté·e avec des compétences polyvalentes
  • Investissez dans la création et la consolidation de vos réseaux.

Y a-t-il autre chose dont vous voudriez nous faire part au sujet du défi que votre organisation a rencontré? 

Venant du secteur à but non lucratif avec pour spécialité la conception et la mise en œuvre de projets, il n’a pas été facile de réussir à se faire une place sur le marché des services de consultance. C’est un environnement très différent de celui que nous pratiquons habituellement et qui plus est, dans notre cas, régi par un droit différent. Lorsque nous avons lancé notre offre de consultance, l’un de nos experts était intéressé par la gestion de nos activités rémunérées, mais s’est ensuite aperçu que l’environnement de travail et les règles applicables aux activités à but lucratif étaient trop éloignés de son domaine de compétence. Il nous est apparu nécessaire de trouver un·e expert·e issu·e du secteur privé/à but lucratif qui gèrerait ces activités pour nous. Le rendement d’activités rémunérées comme des services de consultance est très modeste dans un premier temps ; les attentes doivent parfois s’ajuster à la réalité.

Berhanu Demissie, Directeur exécutif, Centre d’Expertise pour le Développement, Ethiopie

Berhanu est chargé de la levée de fonds depuis 2011. Son principal domaine d’expertise consiste à rechercher des appels à propositions, évaluer leur intérêt par rapport aux programmes, à l’expertise et à l’expérience du Centre d’Expertise pour le Développement (CED), décider de l’opportunité de répondre seul ou en consortium et préparer les notes conceptuelles et les candidatures. Depuis 2015, il a également lancé des activités génératrices de revenus pour le CED, dont la fourniture de services de consultance.

www.decethiopia.org