Écrit par hvale vale, Association for Progressive Communications (APC)
Certaines des informations ne seront pas aussi pertinentes pour la situation actuelle, mais nous pensons que ce guide offre des conseils utiles aux défenseur·euse·s des DSSR.
L’Association APC est un réseau international d’organisations de la société civile (OSC) dont la mission est de soutenir et outiller celles et ceux qui travaillent pour la paix, les droits humains, le développement et la protection de l’environnement, en les aidant à faire un usage stratégique des technologies de l’information et de la communication (TIC). Le fonctionnement d’APC est presque entièrement dématérialisé : nous n’avons pas de siège physique, et nos collaborateur·rice·s sont dispersé·e·s dans différents pays du monde. Depuis une trentaine d’années, nous travaillons sur l’exploration des potentialités d’internet et de son rapport aux inégalités. Lorsque le COVID-19 a frappé, obligeant le monde entier à se confiner, APC s’est trouvée en position d’aider d’autres organisations mises en difficultés par la transition numérique, tant sur le plan professionnel que personnel.
Beaucoup de gens pensaient que le passage au dématérialisé consisterait simplement à transposer leur travail physique sur une plateforme numérique. Or le monde numérique n’est pas un simple mode de communication comme le téléphone. C’est une nouvelle dimension dans laquelle nous vivons, comme le monde physique ou le spirituel. Chacun·e ayant un degré de maîtrise d’internet variable, nous avons vu des organisations aux prises avec un apprentissage brutal et découvrant la fatigue numérique, au niveau professionnel et personnel. Notre défi est de mettre à profit notre expérience pour aider les autres à trouver leur voie de façon productive et sûre.
Notre ressource en ligne : Closer Than Ever: A Guide for Social Change Organisations Who Want to Work Online [Plus proche que jamais : un Guide pour les organisations de transformation sociale qui veulent passer au travail en ligne] a été relancée, et nous avons partagé d’autres expériences du travail dématérialisé. Voici quelques conseils pour assurer le bien-être et la productivité dans ces conditions :
Email – Définissez les heures de travail et faites savoir clairement que personne n’est tenu de répondre à des emails ni d’effectuer d’autres activités en ligne en-dehors de ces heures. Le cas échéant, tenez compte des différents fuseaux horaires de vos collaborateur·rice·s. Gardez à l’esprit les contraintes des technologies : les personnes ou organisations ayant un débit ou un forfait de données limités, ne pourront pas télécharger de gros fichiers ou y accéder en ligne.
Réunions – Il est plus fatiguant de participer à une réunion distancielle que présentielle. Les participant·e·s sont soumis à un stress supplémentaire du fait que le cerveau soit davantage sollicité pour analyser les informations perçues sans l’aide du langage corporel, et parce qu’ils/elles se sentent exposé·e·s en permanence, vulnérables dans leur environnement familial, et parfois mal à l’aise avec la technologie. Les pauses sont également moins fréquentes qu’en présentiel. Vos réunions ne devraient pas dépasser 60 minutes. Pensez également à systématiquement préparer un ordre du jour en ligne et prendre des dispositions pour la prise de notes. Il est important que l’animateur·rice définisse un cadre dès le début de la réunion et autorise les participant·e·s à déconnecter la vidéo à tout moment.
Plannings/productivité – Contrairement à ce que l’on imagine, il faut souvent 30 à 50 % de temps en plus pour effectuer une tâche en ligne. Prévoyez-le dans vos plannings.
Surinformation – c’est un risque particulièrement présent en période de COVID-19, où chacun·e regarde et partage régulièrement les actualités. Les échanges en face-à-face sont transformés en emails, messagerie, tchats et partage de pages. Cela peut devenir étouffant. Organisez-vous pour éviter l’overdose, par exemple en envoyant des circulaires hebdomadaires plutôt que des réponses immédiates, fixez des limites à l’usage de la messagerie, abrégez vos emails pour en faciliter le traitement.
Voir le Guide complet pour plus de détails – lien ci-dessous
Des organisations sans expérience du numérique ont tenté de compresser l’équivalent de plusieurs années d’apprentissage en quelques semaines ou jours.
L’enjeu a également une dimension générationnelle : les jeunes, qui ont déjà l’habitude de certaines de ces plateformes et des communications électroniques, ont négocié cette transition plus facilement que leurs aîné·e·s.
Les organisations peu familiarisées avec le télétravail font face à un risque réel de surcharge et de burn-out. Sans la porte du bureau physiquement fermée le soir, nombreux·ses sont celles et ceux qui se sentent tenu·e·s de participer et de répondre à toute heure.
Le télétravail implique généralement de travailler à distance des communautés avec lesquelles nous interagissons, mais aussi de prendre des distances par rapport à notre rôle privé et familial habituel. Celles et ceux qui télétravaillent le font depuis leur domicile, dans l’espace privé où les relations sont essentiellement définies par les rôles familiaux et dynamiques de pouvoir traditionnels. C’est précisément cet espace que les activistes, les féministes et les personnes représentant la diversité de genre et de sexualité cherchent à transformer.
Nos maisons ne permettent pas toujours aux activistes de s’installer dans une pièce privée pour travailler. Les frères et sœurs, parents, partenaires, enfants, et les autres sont là : ils et elles ont tous besoin de quelque-chose, les négociations sont épuisantes et parfois même impossibles.
Se pose aussi la question du réseau internet auquel nous nous connectons : qui le fournit, avec quels terminaux et quelles garanties de sécurité et confidentialité ? Nous devons garder à l’esprit le caractère exceptionnel de cette période et travailler à construire et assurer un espace sûr et confortable à domicile pour notre activisme, en ayant conscience que cela pourrait bien représenter un nouveau domaine de lutte, quand bien même ce n’est pas le principal.
Closer Than Ever: A Guide for Social Change Organisations Who Want to Work Online (en anglais) [Plus proche que jamais : un Guide pour les organisations de transformation sociale qui veulent passer au travail en ligne]
https://www.apc.org/en/pubs/closer-ever-guide-social-change-organisations-who-want-work-online
Plus proches que jamais : maintenons nos mouvements connectés et inclusifs – Réponse de l’Association pour le Progrès des Communications à la pandémie de COVID-19 (Ce document d’opinion présente la vision actuelle d’APC (Association for Progressive Communications) sur la pandémie.)
An open letter to friends and partners (en anglais) (« Lettre ouverte à nos ami·e·s et partenaires »)
Feminist practices in forced lockdowns and remote lives: From Madrid, Sarajevo and Mumbai (en Anglais) [« Pratiques féministes lors d’un confinement forcé et vies éloignées : de Madrid, Sarajevo et Mumbai »]
Série GenderIT sur la pandémie et la ressource internet :
https://genderit.org/feminist-talk/online-space-making-pandemic-sex-easier-sort
https://genderit.org/articles/grassroot-solidarity-fight-pandemic-farmers-queer-communities
Vos activistes ont-ils/elles utilisé dans cette situation des ressources externes que vous recommanderiez à d’autres organisations ?
Coconet presents Digital Hygiene 101: How to practice digital safety and security (en anglais) [« Coconet présente : Hygiène numérique 101 : Comment mettre en pratique la sécurité en ligne »]
Protéger les droits humains en temps de crise : une série de ressources utiles
Front Line Defenders: Guide pour sécuriser les conversations de groupe et les outils de vidéoconférence. (en français) [« Guide des outils sûrs de tchat et de visioconférence »]
Front Line Defenders: Protection physique, émotionnelle et numérique pour travailler à domicile en période de COVID-19. (en français) [« Se protéger physiquement, émotionnellement et numériquement en télétravaillant depuis chez soi pendant le COVID-19 : Idées et conseils pour les militant·e·s pour les droits humains »]
Un compte personnel : The discipline of hope (en anglais) [« La discipline de l’espoir »]
Hvale Vale pilote le projet EROTICS (Exploratory Research on Sexuality and the Internet – “Recherche exploratoire sur la sexualité à l’heure d’internet ») mené par l’Association pour le Progrès des Communications (APC). En tant qu’activiste, elle s’intéresse à la relation entre les droits des femmes, les droits sexuels et internet, tant sur le front politique que pratique. En 2003, Hvale a piloté la création de la plateforme One World Platform, centrée sur les intersections entre les droits liés à internet, les droits des femmes et le pouvoir transformateur de la technologie. Blogueuse et oratrice féministe, elle est aussi co-fondatrice du portail féministe www.zenskaposla.ba.
https://www.apc.org/en/project/expanding-erotics-network-south-asia